Méthanisation : faciliter l’acceptabilité des nouveaux projets
La production de biométhane est source de questions au fur et à mesure de son développement en France. 365 sites ont produit en 2021 l’équivalent de 1 % de la consommation française de gaz, avec 6,4 TWh de capacité de production installée. Une étude menée par GRTgaz en région Auvergne-Rhône-Alpes se penche sur les attentes des parties prenantes et les leviers pour favoriser l’acceptabilité des futures unités.
Dans son rapport, la mission d’information sénatoriale sur « la méthanisation dans le mix énergétique » a plaidé en septembre 2021 pour la naissance d’un « modèle français » en la matière. Un modèle qui ferait la part belle à des projets locaux de taille raisonnable et qui érigerait la maîtrise des impacts négatifs en priorité absolue. Si un consensus émerge aujourd’hui en France en faveur de l’essor d’une filière biogaz performante, un autre exige que celle-ci se fasse en cohérence avec le modèle agricole français et les exigences de durabilité et de respect des populations.
On le sait, toute nouvelle énergie suscite des interrogations. L’acceptabilité des futurs projets de méthanisation est ainsi devenue un enjeu national, et surtout territorial. Comment se forment les oppositions ? Comment les éviter ? Pour y voir plus clair, GRTgaz a mené une enquête de terrain, en collaboration avec GRDF, l’agence AURA-EE (Auvergne-Rhône-Alpes Énergie Environnement) et la Dreal (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement).
« Il est légitime de s’interroger quand un projet s’installe près de chez soi. Élus et riverains ont un droit de regard. »Léana Fiorito
Chargée de mission méthanisation chez GRTgaz
Un besoin de transparence
« Comme dans toute nouvelle pratique, les exemples d’unités mal gérées existent », rappelle Léana Fiorito, chargée de mission chez GRTgaz, à l’origine de cette enquête riche d’une quarantaine d’entretiens. « La dimension risques et nuisances est sans surprise omniprésente dans les discours d’opposants, autour des notions de sécurité, santé, tranquillité, identité ou attractivité. Quand le dialogue fait défaut, le risque de voir ces craintes se transformer en conflit est fort », constate la chargée de mission méthanisation.
Pour autant, ces incertitudes n’expliquent pas tout. La possible opposition découle aussi d’une remise en cause de l’action publique ou encore d’une contestation des modalités de participation. Dans ce cas, c’est une demande de transparence et de démocratie qui s’exprime. « Le besoin inassouvi de réponses constitue l’un des plus puissants facteurs de conflit », souligne Léana Fiorito.
Quelle est la place de l’élu local dans cette équation ?
Malgré un pouvoir de décision parfois limité en matière de méthanisation agricole, il peut en être cependant un facilitateur. Parfois – et de plus en plus –, l’élu peut aussi se retrouver pris dans un débat local tout à coup exploité par des mouvements nationaux menant des combats de nature politique.
L’implication précoce des élus locaux est clé.
53 000
C’est le nombre d’emplois que la filière méthanisation atteindrait d’ici à 2030 selon le scénario favorable. Source : Mission d’information sénatoriale sur « La méthanisation dans le mix énergétique : enjeux et impacts ».
Quelle est la place de l’élu local dans cette équation ?
Heureusement, l’opposition est loin d’être la norme. Les nombreuses unités de méthanisation qui voient le jour sans rejet révèlent que le dialogue, la transparence et la concertation précoces constituent un remède préventif contre le conflit. Léana Fiorito a également observé que le risque d’opposition se réduisait dès lors qu’un élu s’impliquait tôt pour favoriser la bonne information des riverains.
Certains maires se servent même du projet pour valoriser leur territoire. « Un maire m’a raconté l’avoir appréhendé comme une chance, axant son discours sur le développement local des énergies renouvelables », relate la chargée de mission.
Les bénéfices de la production de biogaz doivent être mieux compris. En apportant un revenu supplémentaire aux agriculteurs, la méthanisation améliore l’attractivité du métier et participe au maintien de l’activité sur le territoire. Un projet qui s’intègre dans une véritable logique circulaire locale (avec la présence d’une station de bioGNV ou le recours aux biodéchets locaux comme intrants) sera en outre bien mieux reçu par la population.
Face aux peurs, enfin, montrer la réalité est efficace. Des visites d’unités de méthanisation ou des réunions associant porteurs de projets, élus et habitants constituent un excellent moyen d’échanger et de valoriser les atouts de la méthanisation pour le territoire. Le contact « le plus direct sera toujours mieux accueilli, analyse Léana Fiorito. Après ce genre d’initiatives, certains riverains ont décidé de retirer les pancartes d’opposition de leurs façades. »
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Article extrait de soTerritoires n°2 - février 2022